BIOMECANIQUE OSSEUSE

Mécanique et biomécanique vasculaire et osseuse

Nous nous permettons un petit préambule avant d’attaquer la matière de base au niveau osseux, avec des considérations d’ordre général concernant la matière vivante.

Comme toutes les matières existant dans l’Univers, la matière vivante est soumise à des sollicitations de la part du milieu environnant sous forme de forces auxquelles elle répond par une réaction identique en grandeur et dirigée dans la même direction, de sens opposé. Ces forces engendrent, soit des déplacements, soit des déformations.

Les déplacements se font avec une certaine accélération  donnée par la formule de Newton,

F=M x a

F – force en Newtons

M – masse en kg

a – accélération en m/sec²

Tant que la force dure, l’objet accélère. Si la force cesse, le corps se déplace en vertu de l’inertie à vitesse constante et ne s’arrête que s’il y a des forces de frottement.

Si la force rencontre une résistance, elle va provoquer une déformation sur l’objet cible, en fonction de la dureté de cet objet. Si l’objet se déforme, on parle d’un choc mou et une partie de l’énergie se dissipe en déformation mécanique et en chaleur. Si l’objet est dur il y a un choc avec communication d’énergie à l’objet qui se met en mouvement.

Dans le cas où la charge est constante, la matière vivante, à la différence de la matière inerte, va réagir de sorte à tenter de minimiser la contrainte à la quelle elle est soumise. La contrainte garde dans ce cas la définition qu’elle a en mécanique, c’est à-dire une force par unité de surface c’est-à-dire un certain nombre de newtons par mètre carré. L’objet vivant va s’adapter avec le temps, va apporter les cellules de secours pour augmenter la surface d’appui de la force et réduire de la sorte la pression de contact ou la contrainte. Par exemple, un vaisseau sanguin supporte une pression sanguine qui est importante au niveau artériel et faible sur le versant veineux.  L’épaisseur de la paroi aortique est proportionnelle au diamètre du vaisseau dans un rapport qui est constant pour tous les vaisseaux et donné par la célèbre loi dite des « chaudières » :

P.R=e.σ

Dans laquelle :

P – est la pression régnant dans la chaudière (supposée cylindrique )

R – est le rayon de la chaudière

e – est l’épaisseur de la paroi de la chaudière

σ – est la contrainte qui nait dans la paroi due à la pression dans le vaisseau

En réalité, P représente la pression différentielle entre l’intérieur de la chaudière et l’extérieur.

Pour exemple l’aorte mesure environ 6cm de diamètre  an niveau thoracique pour 5mm d’épaisseur. Considérons une pression normale de 140mm Hg soit 0.140m x 13560 kg/m³*9.81m/sec²  = 18650 Pa

Ou environ 0.184 atm. On déduit σ = 223800 Pa ou N/m² c’est-à-dire 22.38 N/cm² ou 2.28 kgf/cm²

de contrainte. Ce chiffre est constant pour tous les vaisseaux.

Au niveau cérébral, le même chiffre prévaut mais comme l’intérieur du crâne est un milieu incompressible, la pression extérieure est proche de la pression intra-vasculaire et la pression différentielle entre l’intérieur et l’extérieur du vaisseau très faible. Cela signifie que les vaisseaux intracrâniens sont bien plus grêles que les vaisseaux somatiques. D’où ruptures plus faciles lors des traumatismes violents. Le LCR fait office d’amortisseur (Dashpot en anglais) et protège le cerveau d’une certaine façon contre les traumatismes (cf. les matchs de boxe !)

Cette constatation permet l’existence d’une pathologie propre à l’enfant  bien connue des neurochirurgiens. La tension artérielle des enfants  jusqu’à la puberté voisine 9 cm de Hg.

On assiste au développement d’anévrysme de taille énorme (géants)  chez des enfants justement permis par cette faible pression. Ces anévrysmes éclatent à la puberté lorsque la pression artérielle augmente,  s’ils ne sont pas diagnostiqués et opérés dans le jeune âge. 

Lorsque la pression artérielle augmente, le vaisseau se protège en secrétant un bouclier de cholestérol qui va l’aider à supporter la pression en augmentant l’épaisseur de la paroi jusqu’à ce que la contrainte redevienne  normale.

Considérations sur le système ostéo-articulaire

Les os subissent les principaux efforts de l’organisme et le squelette permet la station debout et le maintien de l’équilibre en permettant l’insertion de la musculature qui est à l’origine des forces créées par l’homme et  l’être vivant en général.

Un principe général immuable, axiomatique, dans l’anatomie de tous les être vivants est qu’un mouvement crée par un organe peut être annulé par un autre organe nommé antagoniste.

Ce principe est vrai pour toute la musculature de tous les êtres vivants.

Des circuits nerveux complexes inhibent les mouvements antagonistes lorsque les agonistes travaillent et inversement.

L’existence de forces importantes impose une adaptation de l’organisme dans l’ «économie » de matière et d’énergie.

En effet, si un os subit une pression anormale, il va s’élargir mais uniquement de la quantité nécessaire au retour des contraintes à des valeurs normales et pas plus. Il n’y a donc pas d’exubérance dans l’être vivant. Si une exubérance semble apparaître, il faut lui trouver l’explication car la nature connaît le principe du « moindre effort », en réalité la recherche de l’équilibre d’un système qui est trouvé lorsque l’énergie du système est minimale.

La colonne vertébrale qui  subit le poids du corps et rigidifie la posture s’est adapté à ce principe d’économie et a pris une forme prévisible de façon mathématique. En effet, on constate une augmentation du volume des vertèbres depuis le cou jusqu’à la région lombaire d’une forme progressive qui épouse la forme d’une colonne d’égale résistance.

En mécanique le problème d’une colonne qui à chaque niveau subit une contrainte constante engendrée par le poids situé au dessus est résolu et donne comme solution une courbe exponentielle qui est justement celle qu’a adopté instinctivement et naturellement la colonne vertébrale des primates.

La vertèbre la plus sollicitée, L5 est la dernière à la base de la colonne mobile. Elle s’insère sur le sacrum qui est une structure rigidifiée par les os du bassin. La vertèbre L5 est donc celle qui est sollicitée le plus en compression mais aussi en flexion vu qu’elle représente le point d’ «encastrement » de la colonne sur le sacrum, donc elle subit les plus grands couples en flexion dans toutes les  directions. Le disque L5S1 est le plus sollicité de toute la colonne d’où la multitude de pathologies qui le concernent depuis que l’homme a acquis la position debout !

Rappelons à cette occasion que la colonne des quadrupèdes, travaille en traction, contrairement aux primates et à l’homme en particulier, où elle travaille en compression !  Il, y a donc eu au cours des millions d’années,  une évolution pour adapter l’ossature des primates à la station debout. Notamment le bassin a du basculer vers l’avant et le haut, ce qui rend l’accouchement des primates plus difficile que les quadrupèdes classiques.

Une adaptation que l’évolution a trouvée intéressante est celle de la forme bizarre des fémurs chez les primates.  En effet, on pourrait se demander pourquoi le fémur a adopté un col qui s’articule avec le bassin en formant un angle de près de 120° avec la diaphyse ?

La mécanique nous donne une réponse qui semble évidente aux yeux de la physique, en faisant toute abstraction de la matière vivante !

En effet, on se permet une petite digression mécanique qui est amusante et qui explique tout naturellement la forme curieuse qu’a adopté la nature pour les os longs des jambes des primates (et accessoirement des autres quadrupèdes).

Pour cela on se réfère à l’équilibre de la bicyclette en marche.

On pourrait se demander pourquoi une bicyclette tient debout en équilibre dès qu’elle roule avec un cycliste dessus.

Le mystère de la bicyclette réside dans la géométrie de la fourche qui reçoit la roue avant.  Il en est de même d’une façon équivalente pour la motocyclette et très curieusement aussi pour les voitures.

En effet, la fourche n’est pas droite mais pliée vers l’avant. De la sorte, l’axe de rotation du guidon n’est pas le même que celui qui passe par le centre de la roue avant. Certains vélos de cirque font correspondre pour les besoin des acrobaties ces deux axes mais l’équilibre alors est assuré par l’équilibriste qui chevauche le vélo.

La forme de la fourche est telle que lorsque le vélo a tendance à chuter ver un côté, le cycliste tourne le guidon vers la côté de la chute. Comme les axes du guidon et de la roue sont décentrés, apparaît un couple de redressement du au frottement du pneu avec le sol et le vélo récupère sa position antérieure. Il en est de même si la chute tend à se faire du côté opposé. Le couple qui apparaît redresse le vélo dans le bon sens. La fourche de la moto est inversée en réalité et c’est au niveau de l’articulation avec le guidon qu’elle se trouve. L’effet gyroscopique des roues est négligeable vu que sur les vélos de course les pneus sont archi légers et l’équilibre n’est à aucun moment mis en défaut. 

Cette caractéristique de la fourche explique pourquoi on peut rouler sans les mains sur le guidon, le redressement se faisant automatiquement. Sur les voitures le même principe est appliqué de façon occulte mais les roues avant se trouvent montés dans une fourche qui par le même principe, permet à la voiture de continuer à rouler tout droit même si on lâche pour une courte période le volant.  

Pour revenir au fémur, le col du fémur est l’équivalent de la fourche du vélo et les efforts pour maintenir l’équilibre et la station debout  sont minimes pour les muscles fessiers et adducteurs qui ne doivent produire que des couples très limités et coordonnés de façon harmonieuse.